Le fonctionnalisme

 

         L'école fonctionnaliste est bien connue en anthropologie et a été initiée par Malinowski et Radcliffe-Brown entre autres. Elle a ses limites évidentes, encore que sa méthode (l'observation participante développée par Malinowski) soit toujours d'actualité (cf. partie sur "l'observation participante").

On ne s'interrogera pas ici sur la validité de la pensée fonctionnaliste (telle que la définit Claude Rivière dans "Introduction à l'anthropologie, Hachette 1995 : "replacer dans leur contexte social les faits décrits, afin de les interpréter, puis à expliquer un phénomène social par la totalité dans laquelle il s'inscrit et dans laquelle il est postulé avoir une ou plusieurs fonctions ainsi que des relations avec chacun des éléments de l'ensemble …").

Plus prosaïquement, il faut constater à quel point l'ethnomusicologie ou sa vulgarisation recèlent de poncifs fonctionnalistes.

Musiques et/ou chants "utilitaires" ou "fonctionnels" (de chasse, de mariage, de labour, etc.).

S'il est certain que nombre de pièces musicales à travers le monde sont spécifiques à un répertoire de circonstance, on peut néanmoins poser que :

1-  Il n'y a pas davantage de raisons de taxer certaines musiques de "fonctionnelles", dès lors que l'on sait que toutes les musiques obéissent à des fonctions précises. Ainsi le kuzu joué par les gbambya d'Afrique centrale pour des cérémonies de deuil n'est pas davantage fonctionnel que la symphonie fantastique jouée par l'orchestre de Radio-France pour divertir et émouvoir son public.

2-  Il est un fait que l'on croit souvent que la fonction esthétique est l'apanage des sociétés dites de "hautes-cultures". A moins de se rallier à l'idée que Lange et Snelleman (in l'Encyclopédie de Lavignac, 1922) se faisaient de l'incapacité de certains peuples à ressentir quoi que ce soit (A propos de la musique des Indes Orientales –Indonésie- : "Les hommes qui se plaisent à cette musique ne possèdent pas ce que nous, habitants de l'Europe, nous appelons l'ouïe artistique musicale …"), comment imaginer qu'un musicien et que ses auditeurs (s'il en a) ne connaît pas le plaisir esthétique ?

Alan P. Merriam (in "The anthropology of music", Evanston, Illinois, Northwestern University Press, 1978) affirme que la musique a ou réalise 10 fonctions essentielles :

- la fonction expressive (exprime, suggère ou provoque des émotions);

- la fonction esthétique (c'est une source d'expérience esthétique);

- la fonction d'amusement;

- la fonction communicative;

- la fonction de représentation symbolique;

- la fonction ou la capacité de provoquer des réponses physiologiques;

- la fonction ou la capacité de renforcer l'acceptation des normes sociales;

- la fonction institutionnelle et religieuse;

- la fonction ou la capacité de contribuer à la stabilité et à la continuité de la culture (renforcer l'identité culturelle);

- la fonction ou la capacité de contribuer à l'intégration de l'homme à la société.

Si le plaisir esthétique de la production et de l'audition musicale sont avérés comme fonction, à quoi bon opposer la musique "fonctionnelle" à celle qui ne le serait pas (puisque c'est souvent cette fonction expressive ou esthétique qui est niée par les fonctionnalistes) ? L'adoption du vocable "musique de circonstance" peut alors paraître préférable.

 

 

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